Cet article prépare et se réfère à l’article : « le Cuir de Russie ».
Le Brai de bouleau, la plus ancienne colle au monde, a été utilisé pendant au moins 50 000 ans, par les sociétés préhistoriques.
Le Brai de bouleau était connu par l’homme depuis le Magdalénien et utilisé comme adhésif pour emmancher les outils, fixer les pointes de lances ou de flèches, décorer des objets, il servait d’imperméabilisant pour les cuirs, et même de pâte à mâcher !
L'utilisation du Brai de bouleau a perduré au moins jusqu’à l’époque romaine.
La Technique : la Pyrolyse
La pyrolyse consiste à décomposer un élément organique par la chaleur, pour obtenir des sous-produits (gaz, fraction liquide et matière solide) et ce, sans présence d’oxygène (anaérobie). Donc le slogan : « Pas d’oxygène, pas de problème ! »
La technique de fabrication du Brai est similaire à celle de la térébenthine (à base de Sève de Pin).
Dans les villages de Russie, spécialisés dans cette production, le procédé concernait et nourrissait toute la population et les procédures mises en œuvre étaient majuscules.
L'écorce de bouleau était récoltée en pelant les arbres sur pied, des arbres soigneusement choisis, les plus âgés étant privilégiés. La saison de récolte de l'écorce la plus favorable se situait vers la fin juin, au maximum de la sève montante. Cette écorce, ensuite, était pressée à plat sous des poids et laissée ainsi pendant une semaine.
Photo : Alex Kamerling à la semaine dans les bois : http://weekinthewoods.org/
La distillation était effectuée selon une méthode proche de la production de charbon de bois. Une grande fosse conique peu profonde de 30 mètres de diamètre était creusée, et tapissée d'argile. Un conduit central était construit, ainsi qu’un drain de fond, menant vers l'extérieur à une fosse de collecte située au-delà de la fosse de feu.
Photo : Alex Kamerling à la semaine dans les bois : http://weekinthewoods.org/
Ensuite, dans la fosse, étaient empilées des couches d'écorce soigneusement disposées, et par-dessus une couche isolante et filtrante de tilleul. (ça vous rappelle la technique de la lasagne ?)
Les écorces étaient positionnées, de sorte qu'il ne reste pas d'espace entre les couches et que la combustion puisse être contrôlée. Une fosse terminée pouvait cumuler une épaisseur de 3 à 6 mètres de matériaux organiques.
Photo : Alex Kamerling à la semaine dans les bois : http://weekinthewoods.org/
Un couvercle hermétique de terre, de fumier animal et de matériaux ignifuges humides était disposé sur la fosse. Un feu de paille était ensuite allumé au centre, qui se propageait lentement vers l'extérieur dans les différentes couches d'écorce de bouleau.
Les brûleurs d'écorce laissaient alors la combustion se poursuivre, scellant soigneusement les fuites d'air dans les zones qui brûlaient trop rapidement. Le goudron coulait à travers l'écorce, filtrait à travers le tilleul, puis vers le drain d'argile et jusque dans la fosse de collecte. Le goudron était immédiatement récupéré de cette fosse et mis en tonneaux. Un brûlage pouvait durer dix jours et nuits, sans interruption, et une quantité de cinq cents charretées d'écorce de bouleau pouvait donner trois mille seaux de goudron. le rendement en goudron est d'environ un tiers du poids de l'écorce utilisée.
Le Brai de Bouleau et le Cuir
La production de l'huile ou Goudron ou Brai de Bouleau pour la fabrication du cuir était un métier spécialisé et pratiqué par seulement quelques villages de Russie, qui fournissaient ensuite les autres sites de préparation du cuir.
Il est probable que d'autres espèces d'arbres pourraient produire une huile ayant des propriétés de conservation similaires, mais l'arôme distinctif du cuir véritable de Russie n’existe que par le bouleau traditionnel.
Les caractéristiques uniques de ce brai de bouleau, rendaient ainsi uniques les Cuirs protégés par ce goudron.
L'huile de cèdre est encore utilisée, aujourd'hui comme ingrédient de conservation semblable, dans les traitements du cuir appliqués aux articles en cuir finis.
Cette production de Brai peut être envisagée aujourd’hui à titre individuel, pour répondre à différentes applications : jardinage, cosmétique, vétérinaire, etc..
Si vous voulez en savoir plus sur la pratique :
de Foulk Barthelemy auquel j'ai emprunté les photos 10 et 12 à 14, ci-dessous
Mode Opératoire pour une production Personnelle :
Voici un mode opératoire inspiré largement d’un texte de Michel Geslin (lien ci-dessous).
Percez le fond d’une boîte (par exemple à peinture), en son centre après l’avoir martelée pour obtenir une forme bien concave.
Insérez-y en fond, un filtre métallique comme sur la photo ci-dessous
Récoltez la fine écorce blanche de bouleaux sur des arbres, même tombés à terre. Évitez d’avoir trop de matière organique dure sous l’écorce.
Placez les écorces récoltées bien serrées dans la boîte et fermez-la hermétiquement.
Creusez un trou dans le sol pour y insérer une boîte à conserve. Celle-ci permettra de récupérer les huiles.
Photo de : https://www.sites.google.com/view/amgp-grand-pressigny/pr%C3%A9histoire-en-touraine/brai-de-bouleau
Rassemblez la terre, si possible argileuse, en la tassant autour de la boîte à conserve.
Posez la boîte à peinture fermée et contenant les écorces, au-dessus de la boîte à conserve. Rassemblez la terre autour pour étanchéifier le tout.
Préparez votre feu. Une forte chaleur est nécessaire pour effectuer une bonne « distillation » des substances contenues dans l’écorce. Laissez votre feu brûler pendant plusieurs heures.
Enfin les braises sont écartées, les marmites refroidies.
À l’ouverture, la Boite à peinture ne contient plus que les restes charbonneux des écorces. Dans la boîte à conserve, on trouve un mélange d'eau et une huile très sombre très odorante.
Il faut éliminer l'eau au maximum et laisser s’évaporer le mélange huile/eau, pour le rendre épais. Sur quelques braises, laissez mijoter sans brûler.
On obtient alors une substance noire, visqueuse, très, très collante, au pouvoir adhésif considérable.
La résistance et la dureté de ce goudron une fois refroidi sont excellentes. Chauffé de nouveau, ce brai ou cette colle est de nouveau utilisable comme agent de liaison entre éléments, même de nature différente.
Autres Applications :
Ce goudron comme mentionné plus haut trouve aussi des applications variées.
En médecine naturelle, pour les toutes sortes de
psoriasis
eczéma
dermatite, Gale
ichtyose
séborrhée
démangeaisons
C’est aussi un
anti-allergénique
cicatrisant des plaies
antiseptique
antibactérien
antifongique
régénérant
anti-inflammatoire
désinfectant
En jardinage, il est utilisé pour la protection des coupes fraiches et traitements d’attaques diverses
En Cosmétique, pour les crèmes, les shampoings, les savons
Le brai de bouleau fut l'un des meilleurs amis de l’homme à travers les âges, grâce a un mélange de créativité, et peut-être d'un peu de folie. Alors, qu'attendez-vous pour vous lancer dans l'aventure du goudron médicinal ?
Quel boulot!!!
très impressionnant. Où peut on trouver un échantillon pour respirer cette odeur mytique?