Tout le monde en Russie sait ce que sont les Lapti. Même si a peu près personne n’en a jamais porté, ces Chaussures folkloriques russes font partie du costume national.
Ces « Sandales (Espadrilles ?) », étaient adoptées par la population paysanne non seulement en Russie, mais aussi en Finlande, aux Pays Baltes, et en général dans les pays Slaves. Un genre de chaussures assez proche était produit par les Japonais et les Indiens d'Amérique du Nord.
Dans les villages russes et biélorusses, les Lapti furent portés jusqu’au début du XXe siècle.
Les Lapti ont été utilisés depuis la préhistoire : on en a retrouvé dans des fouilles datant du Néolithique.
L’Origine du mot .... un peu floue : acceptons la suivante : de Lapata (лопата), la Pelle, et Lapa : (лапа) la Patte.
Lapti est un pluriel, car étrangement ça marche par 2. Au singulier, on a un lápotʹ (ла́поть). D’où l’expression « Touche pas à mon lapot ».
Lapti paysan, de facture grossière,
Mais avez-vous remarqué les 3 bandes ? Adidas n’a rien inventé, et les a copiés,
pour sûr.
Secrets de Fabrication :
Ils sont fabriqués à partir de fibres préparées avec différents types d’arbres, puis ces fibres sont tressées entre elles.
La meilleure fibre était obtenue avec le liber prélevé au printemps, en montée de sève, lorsque les premières feuilles commencent à sortir. Le plus souvent, une telle opération, si elle est conduite à son terme, a pour conséquence de tuer l’arbre.
Avant l’opération de tissage, le liber était trempé dans l'eau tiède pendant 24 heures. Ensuite, le liber était gratté, ne laissant que la fibre.
Un paysan pouvait tisser de deux à dix paires par jour.
Le tissage des Lapti était considéré comme un travail facile, pourtant à bien y regarder, les techniques employées pouvaient atteindre à une belle complication, un peu comme la Vannerie, ou même la Dentelle, ou tout semble si simple, mais où, outre l’adresse gestuelle, il faut un ordinateur dans la tète pour compter les points et les mailles, et réussir les nœuds les plus alambiqués.
Selon les régions, les Lapti étaient tissés différemment, en introduisant des nuances, dans la géométrie, la forme, les renforts latéraux, la semelle, et par l’apport d’autres matériaux comme le cuir.
Certains Lapti étaient tressés a quatre bandes (quadrilatère), cinq bandes (pyateriki), et même six (Shesterikov) ou sept (Semerikov). Tressage oblique ou droit (longitudinal).
Ci-dessous, quelques rudiments de tissage, pour vous y mettre :
Les Lapti d’Orme étaient considérés comme les plus beaux. Quant aux plus simples, pour tout dire les plus minables, élaborés en écorce de saule.
Les Laptis en écorce de chêne s’appelaient des « duboviki » (le chêne est 'dub' en russe).
Les Lapti de corde de chanvre, appelés « chuni », étaient portés par temps chaud et sec.
Dans la province de Koursk, les Lapti étaient faits de pailles résistantes, qui prenaient peu l'humidité.,
Parfois, les Lapti étaient tissés à partir de fibres de bouleau renforcées de sangles de cuir.
Le coût des Lapti était assez modique, au vu de l’abondance de la matière première, et en considérant la facilité de l’exécution.
Cependant, une paire de baskets suffisait à peine pour un homme pendant une semaine, pas plus. Ils traînaient surement les pieds pour aller bosser. Soit 50 à 60 paires par an ! Donc l’investissement annuel restait conséquent à raison de plus d’un rouble par paire. La fabrication maison était une obligation économique.
Tisser des « baskets de fibres » était une occupation hivernale des paysans, quand il n'y avait pas de travail à la terre. Ils avaient déjà leurs Nike ! Ta Mère !
Les sandales fraîchement tissées étaient fabriquées à l’identique, et dans une paire, la gauche ne différait pas de la droite, comme en politique.
J’imagine comment il fallait serrer les cordes pour ne pas se retrouver les chaussettes aux chevilles, tous les trois pas.
Nikolaï Bogdanov-Belsky (1868 – 1945)
Paysanne de la Région de Penza
Paysans de la Région de Smolensk.
Vente de Lapti au marché d’un village de Mordovie, il y a près d’un Siècle.
Photo archives du musée régional de Mordovie, 1926
Aparté :
Pour la rigolade, je vous donne ci-dessous un peu d’infos sur la Mordovie chère à Depardieu : il lui a été proposé le poste de Ministre de la Culture de cette République, surtout connue pour ses camps d'internement et de travail.
Les Lapti aujourd’hui :
La fabrication continue avec une indolence voulue par les adeptes traditionalistes. La fantaisie est pourtant au rendez-vous, et le travail technique très achevé, dans ces formes et coloris modernes.
Les Chaussettes Russes :
Les Laptis étaient indissociables des Chaussettes Russes (Portianki « портянки »), appelons-les ainsi. J’ai cherché longtemps le mot exact. Pas trouvé.
La bande molletière se porte au-dessus de la chaussure, la guêtre couvre le haut de chausse et monte au mollet, peut être le houseau, ou la jambière ?.
La Gamache semble être ce qui se rapproche le plus, enserrant le pied et le mollet.
Les Chaussettes Russes sont 2 morceaux de tissu (généralement de coton blanc) de dimension 40 cm par 80 cm environ et destinés à être enroulé autour du pied, comme démontré ci-dessous.
Pour la petite histoire, cet accessoire a été retiré de l’équipement standard du soldat russe en 2008 !
Le 23 novembre 2007, le vice-ministre russe de la défense Vladimir Isakov a annoncé son remplacement définitif à la fin de l'année 2008 par la chaussette classique.
Pour la grande Histoire :
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