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Ces petits riens russes, qui laissent les étrangers pantois

  • Photo du rédacteur: Alain Mihelic
    Alain Mihelic
  • 13 juin
  • 9 min de lecture

En voyage, ce sont souvent les détails, ces petits riens du quotidien qui nous frappent le plus. De ces petites habitudes naturelles qui peuvent passer, aux yeux des visiteurs, pour de véritables curiosités.


La vaste Russie, fière de ses traditions, ne fait pas exception : nombreuses sont les coutumes de vie des Russes, qui laissent les étrangers tantôt perplexes, tantôt amusés.

Explorons ensemble quelques-unes de ces singularités… et apprenons à les voir autrement.

 


Petits Riens : Boire du thé... dans un porte-verre en métal

 

Si vous prenez le train en Russie, préparez-vous à vivre une scène culte : un verre de thé brûlant, servi dans un élégant porte-verre en métal (подстаканник), apporté par la blonde et accorte stewardesse.


Pour les Russes, c’est un rituel nostalgique, évocateur des longs voyages à travers les steppes, un souvenir d’enfance gravé dans le velours des compartiments.

 

deux porte-verres sur une table

Verre en Amure


Pour l’étranger, cet objet au charme suranné paraît tout droit sorti d’un autre siècle. Et pourtant, il contribue à cette atmosphère si particulière des voyages en train en Russie.


(Voir Article : « les Trains ordinaires en Russie »)


 

Le Sarrasin à tous les repas

 

Petit-déjeuner, déjeuner, dîner : le sarrasin (гречка) est partout !


Aliment de base incontournable en Russie, il déroute souvent les visiteurs. En Europe, il est perçu comme un produit "exotique", réservé aux boutiques bio.


Ici, c’est un plat simple, nourrissant, économique, aux mille variations culinaires possibles.

Les grands-mères russes en louent les vertus santé depuis des générations. Et à y regarder de plus près, elles ont bien raison : le sarrasin est l’un des accompagnements les plus riches en nutriments.


graines de sarrasin

Sarrasin, c’est raison

 

 

La célèbre salade du Nouvel An : Hareng sous un manteau de fourrure

 

Derrière ce nom poétique se cache un plat culte du réveillon russe : séledka pod chouboy (селёдка под шубой).


Un millefeuille coloré de hareng mariné, betteraves rouges, pommes de terre, carottes, œufs… le tout nappé de mayonnaise et d’aneth.


un plat a base de betterave rouge, poisson, carottes et mayonnaise

Coloré et goûteux comme un gâteau d’anniversaire !


Un ovni gastronomique pour les étrangers, mais un incontournable pour les Russes !


Ce plat coloré est un souvenir d’enfance, indissociable des fêtes de fin d’année. Chaque bouchée est imprégnée de convivialité et de traditions familiales.

 


La Posture accroupie

 

Vous verrez peut-être des hommes russes s’accroupir n’importe où, en pleine rue, sur un quai de gare, en attendant le bus, en discutant entre amis.


un homme accroupi, adossé a un arbre

Assis les gueux

 

Cette "position de repos", héritée de la vie rurale, étonne souvent les touristes. Mais pour beaucoup de Russes, c’est simplement une façon confortable de faire une pause.


Le slav squat est devenu un mème internet, associé à l’esthétique des "gopniks" (stéréotype du jeune Russe des quartiers populaires, souvent vêtu d’un survêtement et buvant de la bière).


Certains y voient aussi une posture liée à la prison russe, où les détenus s’accroupissent faute de sièges, mais cette théorie est débattue.


En réalité, c’est surtout une question de confort et de tradition, comme le "seiza" (s’asseoir sur les talons) au Japon.

 

Ce petit détail culturel en dit long sur les codes sociaux et l’histoire russe : un mélange de ruralité, d’adaptation à l’environnement et d’identité populaire. Pour un Russe, s’accroupir est aussi naturel que s’allonger sur un canapé ; pour un étranger, c’est une curiosité !

 

 

Les Pantoufles pour les invités

 

En Russie, pas question de garder ses chaussures en entrant dans une maison ou un appartement. On vous proposera immédiatement des pantoufles (тапочки) pour vous mettre à l’aise.


C’est un geste de respect et de confort : enfiler des pantoufles, c’est être accueilli comme un membre de la famille.


Cette habitude allie aussi l’hygiène au confort : les conditions climatiques conditionnent le nécessaire largage de bottes enneigées, pour des chausses légères et propres.


Ce geste d’hospitalité surprend parfois les visiteurs étrangers, mais qui n’apprécierait pas un peu de confort ?

Dans la pratique, quand la soirée est plus habillée, les invités apportent leurs chaussures d'intérieur.


A ce propos, il coiurant de voir en hiver, au vestiaire des théâtres et salles de spectacles, les gens non seulement se dévêtir mais aussi se déchausser pour enfiler d’élégants souliers.


les pieds dans des pantoufles fourrées

 Douceur et confort


Le Culte de la Propreté


Ennemis jurés : La boue, la neige, et surtout… la poussière ! Les Russes ont un rapport presque sacré avec la propreté de leur intérieur (merci les hivers longs qui font passer 80% du temps à l’intérieur).


Logique implacable : Les chaussures d’extérieur = un crime contre le parquet ciré ou la moquette immaculée. Les pantoufles (тапочкиtapochki) sont donc une barrière symbolique contre la saleté du monde extérieur.

 

Un Rituel d’Hospitalité


"Добро пожаловать!" ("Bienvenue !") = "Chaussez ces pantoufles !". Refuser serait malpoli, comme si tu méprisais les efforts de ton hôte.

Dans les datchas, on opte parfois pour des chaussons en feutre épais (valenki d’intérieur).

 

Psychologie Sociale


Niveler les statuts : Que tu sois un oligarque ou un facteur, tout le monde met les mêmes pantoufles, en une forme d’égalité domestique.


Marqueur d’intimité : Enfiler des chaussons, c’est comme dire "Je fais partie de la famille". D’ailleurs, un invité qui vient souvent finira par avoir sa paire attitrée (un honneur !).

 



Ne jamais souhaiter un anniversaire en avance

 

Attention aux faux pas : en Russie, souhaiter un anniversaire avant le jour J est perçu comme un mauvais présage.

Ce serait attirer le mauvais sort. Cette superstition est encore très ancrée dans les mentalités, et mieux vaut la respecter !

Dans l’imaginaire populaire, le destin écoute, tapi dans l’ombre, un brin susceptible. Et lorsqu’il entend qu’on le défie… il répond parfois.


La raison symbolique

Fêter ou mentionner un événement avant qu'il ne se produise est perçu comme une provocation du destin. Les Russes croient que cela peut "tenter le diable" (искушать судьбу) et faire en sorte que l'anniversaire ne soit pas célébré (maladie, accident, ou même pire).

 

Comparaison avec les funérailles : Certains assimilent cela à "préparer une tombe avant la mort", d’où la connotation macabre.

 

Origines possibles

  • Christianisme orthodoxe : L’idée de ne pas défier Dieu ou le destin est ancrée dans la mentalité religieuse.

 

  • Folklore païen : Les anciens Slaves croyaient que prononcer des vœux trop tôt alertait les esprits malveillants, qui pouvaient alors gâcher l’événement.

 

  • Histoire soviétique : Dans un contexte d’incertitude permanente (guerres, purges), célébrer trop tôt semblait présomptueux.

 


La Bania russe : entre plaisir et épreuve

 

La fameuse bania (баня) : tout un programme avec bain de vapeur brûlante, branches de bouleau pour se flageller, et immersion dans l’eau glacée…

intérieur de bagna avec 2 personnages

Voile de Vapeur douce et caresse feuillée


Mais pour les Russes, la bania est bien plus qu’un simple bain : c’est un rituel de purification physique et spirituelle.


On y discute de sujets sérieux, on y scelle parfois des accords. Et après avoir transpiré des litres, les plus téméraires peuvent courir dans la neige ou plonger dans un lac gelé.

un homme saute dans l'eau froide

Brise-Glace


Voilà qui procure des souvenirs et plaisirs inégalés !

Cela peut sembler extrême — mais l’expérience vaut d’être vécue !



 

Une soupe par jour, ou presque

 

En Russie, pas de repas complet sans soupe: bortsch, chtchi, rassolnik, solyanka…


une belle assiette de soupe avec de la smetana

Par ici la bonne soupe

 

Si, ailleurs, la soupe est souvent reléguée au rang d’entrée légère, ici elle occupe le cœur du repas. C’est un plat réconfortant, qui réchauffe l’âme autant que le corps.

Chaque famille possède d’ailleurs sa propre recette "secrète", transmise de génération en génération.


(Voir Article : « Solyanka, une soupe gourmande »)

(Voir Article : « Recette d’Okroshka »)



 

Câliner les bouleaux

 

Scène insolite mais authentique : en pleine promenade en forêt, on peut voir des gens enlacer les bouleaux.


L'étreinte des bouleaux (обнимать берёзы), voilà une tradition à la fois poétique et profondément enracinée dans la culture slave.


Ce geste, empreint de symbolisme, reflète la connexion spirituelle à la nature. Le bouleau est l’arbre emblématique du pays, porteur de force et de sérénité. Dans les croyances païennes slaves, les arbres étaient considérés comme des êtres vivants dotés d’une âme.

une fille enlace un arbre, l'autre s'appuie dessus

 Embrasse-les tous, dieu reconnaitra les siens


Une pratique thérapeutique ?


  • Certains Russes croient que serrer un bouleau dans ses bras permet de :

    • Se décharger du "mauvais œil" ou des énergies négatives (comme une forme de "mise à la terre").


    • Améliorer l’humeur : le contact avec l’arbre évoquerait un sentiment de paix, surtout en forêt.


  • Scientifiquement, la sylvothérapie (bain de forêt) est reconnue pour réduire le stress… mais l’étreinte spécifique des bouleaux relève plutôt du folklore.


Rituels et superstitions

  • Amour et vœux : Les jeunes filles nouaient parfois des rubans autour des bouleaux pour attirer l’amour.


  • Médecine traditionnelle : La sève de bouleau (берёзовый сок) est bue au printemps pour ses vertus "purificatrices".


  • Attention : Dans certaines légendes, les bouleaux pouvaient aussi abriter des esprits… mieux valait ne pas déranger les vieux arbres la nuit !

 

C'est une sorte rituel de méditation comme une recherche de recharge et d’échange avec l'énergie de la nature.


 

Des toasts… très sérieux !

 

En Russie, on ne porte pas un toast à la légère.


Chaque toast (застолье) est souvent un petit discours, sincère et réfléchi. On lève son verre pour exprimer de véritables souhaits, pour honorer l’amitié, la famille ou même la paix dans le monde !

Toast autour d'un bon repas en famille

C’est a boire qu’il nous faut !


Les étrangers, peu habitués à cette solennité, sont souvent surpris… et émus par cette profondeur inattendue autour de la table.


(Voir Article : « La Vodka, 10 traditions à connaitre »)

 

 

La peur des courants d’air (le "skvoznyak")


Autre détail qui amuse beaucoup les visiteurs : la méfiance des Russes envers les courants d’air.


Le "skvoznyak" (сквозняк) désigne un courant d'air ou une brise traversière, souvent ressentie lorsqu'il y a des ouvertures (fenêtres, portes) opposées ou des fissures dans un bâtiment.


Fenêtres ouvertes, portes qui claquent : autant de situations qui provoquent un réflexe immédiat.

une vieille dame craint les courants d'air

 Si tu croises le vent le vent maraud…


Le "skvoznyak" est accusé de tous les maux : rhume, angine, névralgie…Pour les étrangers, c’est un sujet de plaisanterie, pour les Russes, une préoccupation bien réelle et on évite de s’asseoir dos à une fenêtre ou entre deux sources d’air.


Je partage largement cette phobie, et je cours constamment en été, d’une porte a l’autre de la maison, pour lutter contre ces courants d’air pernicieux.

 


Toujours offrir un nombre impair de Fleurs

 

Attention lorsque vous offrez des fleurs en Russie : le nombre doit impérativement être impair.Un nombre pair est réservé aux funérailles. C’est un code culturel très fort qu’il vaut mieux respecter.

bouquet de roses

Un bouquet de 3, 5, 7 ou 9 fleurs


Un bouquet de 3, 5, 7 ou 9 fleurs ? Parfait pour exprimer vos meilleurs sentiments.


Le symbolisme des nombres :


Impair = Joie, vie, célébration (3, 5, 7, 9...)Offrir un nombre impair de fleurs est associé aux occasions heureuses : anniversaires, rendez-vous amoureux, fêtes, etc.

  1. Exemple : Un bouquet de 5 roses = Amour et admiration.

 

Pair = Deuil, funérailles (2, 4, 6, 8...)Un nombre pair est strictement réservé aux morts (dépôt sur les tombes ou couronnes funéraires).


Pourquoi ? Le chiffre pair symbolise la fin, l’équilibre de la mort (comme les deux bougies allumées dans les traditions orthodoxes).

 

Origines possibles :


Paganisme slave : Les chiffres impairs étaient liés à la chance et à la vie (comme dans d’autres cultures, ex. le "3" sacré).


Christianisme orthodoxe : Les paires sont associées aux rites funéraires (ex. deux cierges pour les défunts).


Les douzaines (12) sont parfois acceptées pour les grandes occasions (mariages), car elles évoquent l’abondance.

Mais en général, mieux vaut rester sur un nombre impair classique (3, 5, 7…).

 

Autres règles concernant les fleurs :


Éviter les chrysanthèmes (liés aux cimetières).


Préférer les couleurs vives (le rouge = amour, le jaune = amitié, mais attention : certaines générations l’associent à la trahison !).

 

(Voir Article : « Superstitions »)

 


Le Respect des Anciens

 

Enfin, un trait de la culture russe qui touche souvent les étrangers : le profond respect pour les aînés.

Dans la rue, dans les transports, en famille : les personnes âgées sont traitées avec considération.


On leur cède sa place, on les aide spontanément, on écoute leurs conseils. Ce respect intergénérationnel impressionne souvent les visiteurs.


Ainsi, céder sa place dans les transports en commun (métro, bus) est une norme incontournable, presque instinctive. Un refus serait perçu comme une grossièreté.

Aider un ancien à traverser la rue ou porter ses sacs est aussi fréquent.


La vieille dame menace le jeune homme

P’tit con, tu vas bouger tes fesses !


Héritage rural et collectiviste et religieux:


Dans les villages, les anciens incarnaient la sagesse pratique (agriculture, médecine traditionnelle).

La génération ayant vécu la Grande Guerre patriotique (1941-1945) est particulièrement vénérée pour ses sacrifices.

Le système soviétique valorisait aussi le respect des "vétérans du travail".

L’Église insiste sur la piété filiale et la charité envers les plus âgés.

 

On utilise souvent des termes ayant une connotation respectueuse et honorifique comme "бабушка" (babouchka) ou "дедушка" (diadouchka) pour s’adresser à eux, même inconnus.

 


Conclusion :


Ce sont ces détails qui font le charme de la Russie !


Ce sont justement ces petites habitudes qui donnent à la Russie son caractère unique et fascinant.Ce que l’on trouve étrange au premier abord devient souvent, avec le temps, attendrissant, inspirant… ou carrément contagieux !


La culture russe, entre traditions intemporelles et codes sociaux puissants


Alors si vous voyagez en Russie, gardez l’esprit ouvert : ces rituels du quotidien pourraient bien devenir vos souvenirs les plus précieux.


Une culture de la ritualisation :


Que ce soit dans les cadeaux, les postures ou les interactions, les Russes attachent une grande importance aux apparences et aux codes, souvent pour exprimer ce qui ne se dit pas explicitement.


Ils montrent que la Russie est une société où le collectif prime sur l’individuel, où le passé dialogue avec le présent, et où les étrangers sont jugés – souvent avec bienveillance – sur leur capacité à saisir ces nuances.


En somme : Comprendre ces traditions, c’est accepter de voir le monde à travers un prisme différent – où s’accroupir n’est pas vulgaire, où offrir deux roses est un présage de mort, et où une babouchka dans le métro mérite plus qu’un siège : votre écoute.

 

2 Yorum

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Misafir
20 Haz
5 üzerinden 5 yıldız

La façon de boire le thé aussi, un peu de concentré du samovar et on rajoute de l'eau, ou on prolonge la durée de vie d'un sachet.

Beğen
Misafir
21 Haz
Şu kişiye cevap veriliyor:

oui, au the froid on ajoute de l'eau chaude , et c'est reparti pour une tournée

Beğen
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